Le projet d’Espaces bleus : préoccupations et incompréhension dans le réseau muséal
Lors d’une conférence de presse tenue au Séminaire de Québec, le 10 juin dernier, le premier ministre François Legault a dévoilé les grandes lignes de son projet d’Espaces bleus en compagnie de la ministre de la Culture et des Communications, du maire de Québec et du président-directeur général du Musée de la civilisation.
Alliant identité, patrimoine bâti et territoire, avec une intention affirmée de renforcer le sentiment de fierté individuelle et collective, ce projet est assorti d’une enveloppe « d’argent frais » s’élevant à 259 M$ prévus dès le budget 2020-2021. Outre le désir de sauvegarder et de valoriser des bâtiments patrimoniaux – pas seulement religieux –, M. Legault a exprimé sa vision d’Espaces bleus dans toutes les régions du Québec comme des lieux interactifs, accessibles et fréquentés par les jeunes. Or, la mission muséale de ces lieux ne semble pas clairement définie, mis à part le fait que le Musée de la civilisation a été mandaté par le MCC pour piloter l’ensemble du projet et implanter l’Espace bleu « en chef » dans l’ancien Musée de l’Amérique française qui deviendra la Cité du Séminaire et comportera un important volet consacré à la vulgarisation scientifique.
Si le projet des Espaces bleus représente une occasion de réfléchir à ce que nous voulons protéger, valoriser et construire collectivement, force est de constater que la communauté muséale s’inquiète du rôle de ces nouveaux acteurs, tout comme de leur impact au sein du réseau muséal. En effet, il importe de rappeler à quel point ce réseau, constamment appelé à se transformer, demeure fragile financièrement, fait face à des enjeux de main-d’œuvre et à des défis de taille en matière d’infrastructures, de collections, etc. De plus, l’écosystème muséal devra aussi composer avec les séquelles de la pandémie de COVID-19 encore longtemps. Toutes ces personnes qui portent, trop souvent à bout de bras, une maison historique, un moulin ancestral, un bâtiment industriel sauvegardé, un musée régional, un site historique, un musée scientifique, un centre d’art doivent encore et toujours faire plus avec moins de ressources.
Dès que les premiers éléments concernant ce projet ont été portés à son attention, la SMQ a prévenu le MCC des enjeux et des préoccupations qu’un tel projet allait soulever dans le milieu. Ainsi, plusieurs membres appréhendent l’apparition d’un Espace bleu dans leur région, percevant cette présence comme une concurrence. D’autres s’inquiètent d’un possible dédoublement des mandats. Enfin, l’inquiétude quant aux conséquences financières de ces nouveaux acteurs est sur toutes les lèvres. À ce chapitre, la SMQ a reçu l’assurance du Ministère que l’enveloppe du PAFIM ne serait nullement affectée par ce projet et qu’aucune institution muséale agréée ne le serait non plus. Enfin, comme en témoignent de récentes interventions dans les médias à ce sujet, le milieu muséal est très déçu du manque de concertation dans la préparation d’un tel projet.
En terminant, rappelons qu’en tant que porte-parole du réseau muséal, la SMQ poursuit les échanges avec les différentes parties prenantes, faisant valoir l’importance de considérer les réalités spécifiques des différentes régions et de rester à l’écoute des propositions qui émergent du milieu. Qui plus est, elle entend préparer des recommandations pour le gouvernement afin d’assurer la viabilité et le rayonnement du réseau muséal du Québec dans toute sa diversité.
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